Sylvain Reboul

LA GEOMETRIE EROTIQUE DE MICHEL JOUËT

La rencontre avec les œuvres de Michel Jouët me plonge dans l’équivoque: géométrie froide, minimale et néanmoins subtile, vibrante, sus tendue par une sensualité (dé)libérée : je découvre alors que, à l’opposé de l ‘art de François Morellet, du puritanisme moral de celui-ci qui se manifeste par l’humour et la dérision, Jouët, alors même qu’il utilise ou réinvente un langage proche, construit une géométrie variable du plaisir: un érotisme à la pureté ironique et joyeuse.

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Frédéric Panni

En petit et en grand

Michel Jouêt (né en 1943) pratique depuis les années 1960 un art qualifié de géométrique, concret ou construit. Disons qu’il imagine avec méthode et réalise avec des moyens plastiques élémentaires des séries d’objets de pure forme qui constituent de réelles expériences visuelles pour leur spectateur. L’originalité et la richesse d’invention de l’artiste sont connues de ses pairs et des amateurs. La rigoureuse légèreté des ses « peintures » et la malicieuse austérité de ses compositions sont des constantes.

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François Molnar

Volupté ou austérité ?

La préface d’un catalogue, traditionnellement, sert à expliquer les œuvres exposées, partant du principe de toute évidence faux que le préfacier connaît mieux les œuvres et l’intention de l’artiste que l’artiste lui-même. Le préfacier prétend traduire l’œuvre, une sorte de traduction de langage codé en langage clair. Malheureusement, il n’y a ni grammaire, ni vocabulaire pour cette traduction, et peut-être n’y a-t-il même pas de contenu à traduire : il est difficile d’expliquer l’inexplicable. Il faut pourtant écrire, c’est la tradition qui le veut. D’où la langue de bois de tant de critiques depuis un demi-siècle. Les anciens n’avaient pas de problèmes, Vasari de la ressemblance : « Il ne lui manque que la parole » était son compliment favori. Diderot voulait que le portrait d’un tailleur ressemble à un tailleur ; même Baudelaire et Zola avaient à leur disposition ce « garde-fou » qu’est la nature.

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Michel Luneau

Le même et son contraire

L’eau et le feu. Pour une fois ensemble et s’attirant. D’un côté les vagues dans un enroulement incessant, de l’autre le miroir, l’impassibilité obstinée du miroir. D’un côté la paix de l’eau gelée qui protège son mystère, de l’autre le fleuve en crue qui déverse et déverse. D’un côté l’émotion violente, de l’autre le silence assourdissant. D’un côté Stravinsky, son sacre du printemps, de l’autre l’hiver de Vivaldi, notes et neige immaculées. D’un côté la prière, de l’autre le tourment. D’un côté le passage en force de la lumière à la forme, de l’autre la sérénité d’une clarté en apparence neutre, synthèse éblouissante des sept couleurs du spectre. D’un côté la gesticulation furieuse, incroyablement maîtrisée, des vides et des pleins, de l’autre le geste bref, méticuleux, mathématique qui n’autorise que le cercle ou le trait ou le point. D’un côté la sensualité affichée, la volupté de l’herbe qui se donne libre cours, de l’autre la pudeur attisante, secrète, anxieusement contenue.

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Gilbert Lascault

Michel Jouët et l’humour de la géométrie

1- Les non-géomètres peuvent, eux-aussi, entrer

Une tradition indique qu’au fronton de l’Académie, Platon aurait fait inscrire la phrase : « que nul n’entre ici s’il n’est géomètre ». Cette phrase signifie, bien sûr, que la géométrie doit déjà être connue par le futur philosophe, que l’étude de la géométrie peut être considérée comme une propédeutique à la réflexion philosophique, que la géométrie ne sera pas enseignée dans l’Académie même… L’attribution de cette phrase à Platon est d’ailleurs contestée (1).

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Frédéric Khan Panni

Michel Jouët à l’ouvrage

Michel Jouët nous donne des objets intéressants à voir. Insistons : qui présentent des qualités originales du point de vue plastique, de la mise en forme des matériaux. Le travail est déjà salutaire à cet égard.

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Dietmar Guderian

Manifestations naturelles.

Une dernière composante, non moins importante, de l’œuvre de Michel Jouët, intègre des phénomènes naturels auxquels l’artiste confère une valeur artistique dans des œuvres étrangement attirantes. Pour réaliser Paysage aux meules (1988), il photographie des balles de foin, dispersées dans un champ visibles de la terrasse de sa maison. Elles apparaissent comme des rectangles dont la taille se réduit avec la perspective, à l’exception d’une qui, ayant pivoté, se présente comme un cercle. La régularité de la répartition des rectangles marque ici de façon encore plus intense que dans les œuvres, précédemment présentées comme pseudo-chaotiques, qu’il n’y a aucune part de hasard et que ces objets sont soumis à une structure d’ordre qui, bien qu’elle ne soit pas rigoureusement mathématique, n’en reste pas moins perceptible.

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Bernard Fauchille

DE LA NATURE DES CHOSES

L’univers est mathématique. Démocrite, Pythagore, et certaines démonstrations contemporaines sont suffisamment explicites. Inutile d’y revenir. Les constatations sont multiples, que la nature se meurt, se développe selon des proportions, des schémas, des progressions que l’homme a synthétisé en formules : chute des corps, spirales diverses, etc.

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Ben Durant

LE FIL A PLOMB D’ARIANE

On pourrait assimiler le travail de Michel Jouët à un parcours initiatique, ne le voit-on pas dès 1967 dérouler son fil d’Ariane à travers le labyrinthe des craquelures, exploiter ensuite les fissures du bois, suivre la dispersion solsticiale des meules de foin ou traquer la géométrie aléatoire de traces d’avion (« Plane Trails », 1991) dans le ciel – suite logique – Comme Icare, il fait le dédale pour s’élancer à l’assaut de la voûte céleste, vaincre la terrible pesanteur et confirmer le Corbusier qui disait que toute construction doit se faire « en verticale dans le ciel ». Ainsi dès 1987, l’artiste jette un fil lesté entre ciel et terre.

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